J’ai bafoué toutes mes valeurs pour continuer à consommer

Je m’appelle Mathis, j’ai 22 ans et je suis un toxicomane en rétablissement*. Ma mère a été absente pendant une partie de mon enfance parce qu’elle consommait. Cette absence et ce besoin d’être aimé par ma mère m’ont amené à toujours rechercher de l’amour et de l’attention chez les gens. J’ai commencé à consommer à l’âge de 11 ans dans le but de me faire accepter et de faire partie des gens « cool » de l’école. J’ai rapidement pris goût à l’effet grisant de la drogue et j’avais l’impression que j’entrais en contact plus facilement avec les gens.

Je me suis mis à fréquenter des gens plus vieux que moi et à vendre de la drogue. Je me sentais enfin important aux yeux des gens. Mais avec la consommation sont venus les mauvais coups et les délits, suivis de regrets, de culpabilité et de remords. Donc, pour me sentir mieux, je fuyais mes émotions en consommant encore plus. Ce cercle vicieux aura duré près de 10 ans avant de toucher mon bas-fond. Le jour où j’ai perdu mon frère des suites d’une overdose, j’ai aussi perdu le contrôle total de ma vie. J’ai repoussé tous ceux qui étaient présents pour moi, je m’entourais de personnes qui souffraient pour éviter de me faire juger. J’ai fait souffrir ma famille et j’ai bafoué toutes mes valeurs pour continuer à consommer et pour ne plus rien ressentir.

Je suis arrivé à Portage Saint-Malachie complètement brisé, après avoir frôlé la mort à plusieurs reprises. Dépourvu d’estime personnelle et d’amour-propre, j’ai entamé mon programme de thérapie. Je n’aurais jamais cru finir un programme et être la personne que je suis aujourd’hui. Mon arrivée à Portage, bien que volontaire, n’a pas été facile. Petit à petit, j’ai recommencé à manger (très bien d’ailleurs), à prendre soin de moi, et j’ai appris à avoir une hygiène de vie saine. J’ai travaillé sur mon orgueil démesuré et l’humilité s’est frayée une place dans mon cheminement. J’ai commencé à écouter et à comprendre les autres avant de vouloir être compris. J’ai appris à mettre des mots sur mes émotions et à agir selon mes valeurs. J’ai travaillé à réparer mes liens familiaux que j’avais complètement brisés. J’ai réussi à me pardonner pour toutes les souffrances que j’ai causées à mon entourage et, bien sûr, à moi-même. J’ai reconnecté avec mes passions. J’ai identifié des objectifs et des buts que j’avais envie d’accomplir, comme retourner à l’école. C’est une fierté, mais aussi une chance énorme de m’être rétabli à Portage. J’ai retrouvé mon cœur d’enfant à travers les activités qui nous sont offertes en thérapie, comme : le camping d’hiver, les cours de judo, les nombreux sports, la musique et bien plus. J’ai aussi eu la chance d’avoir été accompagné par des intervenants extraordinaires, qui travaillent avec leur cœur, qui sont présents pour nous et qui nous comprennent.

Aujourd’hui, je suis fier de mes accomplissements. Je suis en appartement avec ma copine, qui m’a soutenu tout au long de ma démarche. J’ai un travail que j’aime, j’ai été accepté afin de compléter mon cours en mécanique spécialisée en engins de loisir. Je suis proche de ma famille et je suis heureux. J’ai donc énormément de gratitude envers Portage, car mon programme m’a sauvé la vie.

J’éprouve aussi énormément de gratitude envers tous les intervenants qui m’ont accompagné tout au long de mon programme car c’est grâce à eux que Portage continue d’aider des personnes comme moi à traverser l’enfer de la dépendance. Donc, au nom de tous les jeunes qui ont fait ou qui font leur programme en ce moment, je tiens à vous dire merci beaucoup.

Témoignage d’un usager en réinsertion sociale du programme adolescents et jeunes adultes, Portage Saint-Malachie, 2025

* Mathis utilise avec fierté le terme « toxicomanes en rétablissement ». Nos résidents se réapproprient ces mots pour décrire leur parcours de vie, reconnaître leur cheminement et affirmer leur force tout au long de leur réhabilitation.