effets cannabis jeunes

04-16-2018

Le cannabis constitue la drogue la plus couramment consommée par les jeunes canadiens âgés de 15 à 24 ans, comparativement aux jeunes d’autres pays, selon un rapport du Centre de recherche de l’UNICEF (2013)[1]. De plus, ce qui est inquiétant par rapport à cette tendance, c’est que plusieurs recherches révèlent que les jeunes ne connaissent pas bien les effets et les méfaits du cannabis (CCLT)[2].

Dans le contexte de la légalisation du cannabis au Canada, qui est inéluctable, Portage a décidé de participer au débat en invitant l’ensemble des protagonistes à la vigilance face aux impacts de cette décision gouvernementale. Notre message principal est que la légalisation du cannabis n’arrête pas la dépendance, elle banalise au contraire sa consommation. Une consommation qui est en constante augmentation chez les jeunes qui fréquentent nos cinq centres pour adolescents au Québec, en Ontario et en Atlantique. En effet, le nombre de jeunes âgés de 14 à 21 ans qui ont déclaré lors de leur admission à Portage être principalement dépendants au cannabis a progressivement augmenté au cours des 10 dernières années (contrairement au nombre de résidents adultes qui demeure stable).

Cette augmentation pourrait être due au fait que, selon une récente étude du CCLT[3], sur laquelle nous nous sommes basés pour rédiger cet article, l’ensemble des jeunes pensent que le cannabis est moins nocif que l’alcool et les autres substances. Cette perception, qui résulte d’une méconnaissance des effets et des méfaits du cannabis, tend à rendre les jeunes plus susceptibles de commencer à consommer.

 

Cannabis vs alcool : les jeunes pensent que le premier est moins pire que le second

Selon les jeunes participants de cette étude, l’alcool est considéré comme étant plus nocif que le cannabis et entraîne plus de problèmes et de conséquences. Les personnes « saoules » sont décrites comme des gens qui titubent, déparlent et peuvent démontrer des comportements violents, tandis que les personnes « gelées » semblent être plus joyeuses et relaxes, assises sur le canapé en train de grignoter. Les réactions physiques négatives suite à la consommation d’alcool, comme les vomissements, la perte de mémoire et les gueules de bois, ne se produisent jamais, selon eux, avec le cannabis.

La perception des effets du cannabis par les jeunes est plutôt positive et ses effets négatifs à court terme, qui peuvent être ressentis même par des consommateurs inexpérimentés, tels que l’anxiété intense, la panique et les symptômes psychotiques, ne sont pas ressortis dans leurs commentaires. Les méfaits à long terme non plus. Or, plusieurs constatations scientifiques montrent un lien entre la consommation «régulière » ou « forte » de cannabis (usage quotidien ou presque) et les conséquences psychosociales, de santé physique et de santé mentale (CCLT)[4]:

 

  • La consommation du cannabis peut mener à l’utilisation d’autres substances illicites.
  • Le risque de dépendance et de développement de symptômes de tolérance et de sevrage comme la dépression, l’insomnie, l’anxiété et des troubles de l’appétit.
  • Le risque de développement de troubles psychotiques tels que la schizophrénie.
  • Le risque d’intoxication (au Canada, en 2011, 1600 hospitalisations liées aux cannabinoïdes ont été recensées).
  • Les risques de développer un trouble d’apprentissage et de ressentir des difficultés dans la réalisation des travaux scolaires.

Selon la majorité des experts, ces résultats négatifs s’expliquent par les importants changements structurels et neurochimiques qui se produisent dans le cerveau à l’adolescence, qui demeure en développement jusqu’à l’âge de 25 ans.

 

Les jeunes pensent que cannabis a peu d’impact sur le développement du cerveau

Interrogés sur les effets du cannabis sur le développement du cerveau, la majorité des jeunes participants de l’étude considéraient que le cannabis était potentiellement nuisible, mais sans savoir trop comment ou pourquoi et sans les dissuader d’en consommer. Selon plusieurs, une grande quantité de cannabis consommée sur une longue période auraient des effets nuisibles à long terme qui ne seraient pas évidents à court terme. Une consommation modérée ou récréative n’aurait pas d’impact sur le cerveau.

Les experts sont unanimes à ce sujet. « À l’adolescence, le cerveau doit passer par plusieurs étapes clés du développement neural pour être pleinement prêt à la vie adulte. […] Les régions cérébrales les plus optimisées pendant l’adolescence sont celles impliquées dans la prise de décisions, le jugement, la planification et la résolution de problèmes, et ces régions seraient plus vulnérables aux effets du cannabis quand elles ne sont pas encore pleinement développées »[5].

C’est pourquoi Portage a recommandé aux gouvernements fédéral et provincial de ne pas légaliser le cannabis avant l’âge de 21 ans. À défaut de considérer cette proposition, nous avons recommandé que les jeunes adultes de 18 à 24 ans soient considérés comme un groupe prioritaire dans le cadre de la période de transition prévue au projet de loi, du comité de vigilance et pour les activités de recherche.

 

Cannabis et toxicomanie: le lien n’est pas clair pour les jeunes

Nous avons mentionné plus haut le risque de dépendance comme un des effets de la consommation du cannabis. Les jeunes participants interrogés sur la question de la nature toxicomanogène du cannabis, en d’autres mots que le cannabis peut induire de la dépendance, plusieurs croyaient qu’il ne l’était pas du tout.

D’autres ont mentionné que la dépendance au cannabis faisait partie d’une catégorie différente de toxicomanie en ne se comparant pas aux autres drogues. « Par exemple, certains participants ont suggéré que la toxicomanie au cannabis se produirait graduellement, au fil du temps, comme une habitude, plutôt que comme les réactions physiques immédiates associées aux autres drogues (p. ex., la cocaïne) ou uniquement dans les cas où une personne consommait des quantités importantes de drogue. […] La dépendance au cannabis était « mentale », par opposition à physique, où la personne cherche la sensation d’être sous l’influence du cannabis, plutôt que d’un besoin corporel de la substance »[6]. En gros, les jeunes semblaient croire que leur consommation est sous contrôle et qu’ils sont en mesure de la stopper à tout moment (Lire La drogue et l’alcool : des pièges sournois).

 

Conclusion : une méconnaissance inquiétante dans un contexte de légalisation

En croyant que le cannabis ne peut pas induire de dépendance, ou que celle-ci serait uniquement « mentale », les jeunes s’exposent d’autant plus au risque de devenir dépendant.

En percevant le cannabis comme étant moins nocif que l’alcool, les jeunes deviennent plus susceptibles de commencer à en consommer.

En pensant que le cannabis n’affecte pas ou peu le cerveau, les jeunes se rendent vulnérables à des effets physiques et mentaux qui peuvent être lourds de conséquences.

Portage reçoit annuellement environ 500 adolescents entre 14 et 18 ans et, de ce nombre, 88 % déclarent être dépendants au cannabis. Nous sommes confrontés quotidiennement aux impacts dévastateurs de l’utilisation abusive du cannabis, une utilisation qui a toujours débuté de façon inoffensive et récréative.

 

Lire les témoignages de nos résidents :

Le cannabis : une herbe sournoise

Comment le cannabis m’a détruite

De fumeur de pot à allumeur de réverbères

 

10 signes que votre adolescent consomme de la drogue

7 façons d’entamer une discussion sur la consommation de drogues avec un jeune

 

Pour consulter notre campagne :

LA LÉGALISATION N’ARRÊTE PAS LA DÉPENDANCE. Soyons vigilants.

 

 

[1] https://www.unicef-irc.org/publications/pdf/rc11_fre.pdf

[2] CCLT, Les perceptions des jeunes Canadiens sur le cannabis, 2017. http://www.ccdus.ca/Resource%20Library/CCSA-Canadian-Youth-Perceptions-on-Cannabis-Report-2017-fr.pdf

[3] CCLT, 2017. L’enquête a été réalisée selon une approche quantitative.

[4] CCLT, Les effets de la consommation de cannabis pendant l’adolescence, 2015, p. 17. http://www.ccdus.ca/Resource%20Library/CCSA-Effects-of-Cannabis-Use-during-Adolescence-Report-2015-fr.pdf

[5] CCLT, 2015, p. 11.

[6] CCLT, 2017, p. 28.

 

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