06-14-2019

Les
produits comestibles au cannabis (friandises, biscuits) vont être autorisés à
la vente et la consommation en octobre prochain. Cette « deuxième
vague » de légalisation entraîne avec elle des préoccupations quant à
l’attrait et la dangerosité de tels produits.

Des intoxications d’enfants à Montréal

Le 17 mai 2019, l’Hôpital de Montréal pour enfants tire la
sonnette d’alarme quant aux produits comestibles à base de cannabis. L’hôpital
a traité 26 cas d’intoxications ou d’usages de cannabis chez des mineurs depuis
le 17 octobre 2018. Pour la plupart d’entre eux, ces enfants ont consommé des
biscuits ou des brownies au cannabis laissés sans surveillance par leurs
parents. Bien souvent, ces intoxications sont accidentelles mais elles laissent
planer le doute sur ces produits très attrayant pour les jeunes. Dans une
entrevue parue dans le journal Le Devoir, le Dr Dominic Chalut, urgentologue et
toxicologue au HME explique : « les effets du cannabis sont
considérables sur les enfants ». D’après les rapports médicaux, les
symptômes de ces intoxications peuvent aller de pertes d’équilibre et de
vomissements à de violentes convulsions pour les cas les plus graves. Le Dr
Chalut met en garde contre la commercialisation des produits comestibles de
cannabis : « Il faut protéger nos enfants de ce type de produits.
Mais surtout, comme société, on devrait se demander : voulons-nous vraiment que
des drogues psychoactives se retrouvent dans des aliments inoffensifs et
attirants comme des bonbons ou des biscuits ? ».

Inquiétudes

Les recherches menées sur les effets du cannabis comestible
ont montré que ces produits sont absorbés différemment par le corps. Les
produits dérivés peuvent mettre plusieurs heures à agir, ce qui pousserait les
gens à consommer des doses bien plus importantes et donc s’exposer à des
surdoses. Les produits vendus ne sont pas nécessairement plus forts ou plus
concentrés en THC (la molécule active du cannabis) mais le fait qu’ils soient
sucrés et qu’ils agissent en plus de temps pousserait la prise de doses plus
importantes.

Fumer du cannabis est très populaire chez les jeunes mais il
y a une sorte de conscientisation des effets sur l’organisme par cette partie
de la population. Comme la cigarette, le cannabis a mauvaise réputation. Le
fait de commercialiser le cannabis sous forme de friandises, enlèverait l’image
dangereuse de ce produit et pourrait pousser plus de jeunes à essayer. Un
phénomène similaire a pu être observé ces dernières années avec la nouvelle
génération de cigarette électronique. Le coté attractif, sans aspect dangereux
pour la santé a fait bondir le taux de consommation chez les jeunes en Amérique
du nord.

Une histoire de profits, et après?

Malgré d’énormes problèmes au démarrage, la Société
québécoise du cannabis (SQDC) a enregistré plus de 70 millions de dollars de
ventes au cours des six premiers mois de la légalisation. L’arrivée sur le
marché du cannabis comestible est une aubaine pour les producteurs et les
revendeurs. Selon le PDG de la SQDC, Jean-François Bergeron, la SQDC s’attend à
percevoir près de 20 millions de dollars de bénéfices notamment grâce au
cannabis comestible. Le Québec est la deuxième province derrière l’Alberta à
avoir comptabilisé le plus de ventes de cannabis.

Véritable mine d’or, le cannabis comestible ne manque pas
d’investisseurs. Canopy Growth, entreprise canadienne spécialisée dans la
production de cannabis à usage médical, a récemment conclu un accord de 5
milliards de dollars avec la multinationale Constellation Brands (distributeur
de la bière Corona). Le but de cette entente est de développer des boissons à
base de cannabis. Le directeur général de Canopy Grow s’attend à une explosion
de la demande de ce produit : « Ça va être une autre vague,
alors il vaut mieux s’habituer à être occupé ». De quoi ravir les investisseurs
de « l’or vert ».

Produits déjà en ligne

Si les produits comestibles à base de cannabis seront
introduits le 17 octobre 2019, ces derniers sont déjà largement accessibles sur
internet. Nous avons essayé de taper « cannabis comestible » dans un
moteur de recherche et plusieurs sites en proposent déjà. Ces sites sont des revendeurs
en ligne et doivent s’assurer d’obtenir une pièce d’identité ainsi qu’une carte
de crédit de la part du client. Un des sites que nous avons visité pour notre
test ne demandait pas plus qu’une adresse valide au Canada ainsi qu’un virement
Interac (transfert d’argent via internet). À aucun moment il n’a été demandé de
pièce d’identité pour procéder à la commande des produits comestibles à base de
cannabis. Pire encore, le site en question se définit lui-même comme un
détaillant de cannabis à usage médical! Dans ce cas, les vendeurs de cannabis
thérapeutiques sont obligés de demander une ordonnance délivrée par un médecin
traitant. Il semble donc extrêmement aisé de se procurer des produits
comestibles via internet, néanmoins cette pratique reste illégale pour le
moment.

L’état du Colorado, aux États-Unis, est un exemple concret et
documenté d’un pic d’augmentation des usagers quotidiens après l’instauration
de produits dérivés à base de cannabis. Ainsi, l’arrivé du cannabis comestible
légal semble être une aubaine pour les producteurs et les industries. En revanche,
personne ne peut prédire les impacts sur l’acceptabilité et la consommation des
jeunes au Canada.

One Response to “Cannabis comestible : la deuxième vague de légalisation arrive cet automne”

  1. SUZANNE LABERGE

    C’est très troublant de lire ces lignes. Le gouvernement fédéral devrait se poser les bonnes questions et réévaluer la mise en vente de produits dérivés. Déjà que la légalisation du Cannabis n’a pas été l’idée du siècle! C’est dommage mais où il y a de l’argent a faire on devient totalement irresponsable.

    Répondre

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